Axslnyz, la planète des écrivains
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 L'Arménien (yaoï)

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Kestrel21
Tit axslnyzien
Kestrel21


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MessageSujet: L'Arménien (yaoï)   L'Arménien (yaoï) EmptyMar 21 Mar - 22:43

Titre : L’Arménien - première partie
Auteur : Kestrel21
Statut : Achevé
Genre : Dialogue, mention de yaoï.
Disclaimer : Les personnages m’appartiennent.

A mes amies, mes plus fidèles lectrices !

Paris, 1995

Assis, non, planté, sur une petite banquette inconfortable, je consulte ma montre fébrilement.
22 h 45… Pourquoi les urgences surviennent-elles toujours en pleine nuit ?
Précisément les soirs où on rentre harassé de fatigue et après 3 heures dans les embouteillages, avec pour seul accueil un message sur le répondeur. Un message de l’hôpital avertissant que sa fiancée est sur le point d’accoucher… Hein, pourquoi ?
Je resserre ma prise encore plus fort sur les trois narcisses joliment enturbannées que je comptais lui offrir une fois à la maison. Ces fleurs préférées…
Ce sera pour tout à l’heure, en espérant qu’elles n’aient pas fané d’ici là.
J’ai vraiment du mal à réaliser que je recevrais bientôt dans mes bras un petit bout de chou, tout rouge, tout plissé et tout hurlant, et que je serais papa, pour de bon cette fois…
En attendant, je suis beaucoup trop énervé pour réfléchir, je me lève et me met à parcourir le couloir, à tourner comme un lion dans une cage trop petite.
Mais mes jambes flageolent, comme pour me rappeler que je suis mort de fatigue. Et mon estomac gargouille, me rappelant lui aussi que je n’ais rien avalé depuis ce minuscule sandwich, à midi.
L’hôpital semble désert, il n’y a pas le moindre bruit, aucune trace de la moindre infirmière, même la plus discrète ou la plus menue. Ça me rend très mal à l’aise.
Des portes à perte de vue, hermétiquement closes, je pense au film Shining, qui m’avait fait pleurer de peur malgré mes 15 ans, à la vérification minutieuse et quotidienne du gardien de l’hôtel vidé de ses occupants, de toutes ses portes identiques mais derrière lesquelles pouvaient se cacher tant d’horribles secrets…
Je secoue la tête. S’il y a bien un moment où je ne devrais pas penser à ça, c’est bien celui-là !
Les tiges gorgées d’eau des narcisses humidifient ma manche, c’est alors que je crois entendre un petit bruit, comme les pleurs d’un nourrisson.
Sans réfléchir, je me précipite sur la porte derrière laquelle ils semblent provenir, et sans même songer à frapper, je l’entrouvre.
Une petite loupiote scintille à l’intérieure, juste assez brillante pour me montrer que je me fais des idées.
Aucune trace de bébé, juste un homme alité, qui me fixe avec surprise en clignant des yeux.
« - … Pardonnez-moi », marmonnais-je, gêné.
Je m’apprête à refermer la porte mais sa voix m’interrompt.
« - Non, attendez. »
A mon tour d’être surpris. La main vissée sur la poignée, je lève vers lui un regard interrogatif.
Lui sourit avec bienveillance.
« - Ne restez pas là, entrez. »
Cette gentillesse est surprenante, je suis un parfait inconnu qui vient sans doute de le tirer du sommeil par son manque de délicatesse, et lui m’invite à entrer.
Il serait tellement impoli de refuser à ce stade que je n’y pense même pas. Je pénètre donc dans le chambre.
« - Asseyez-vous donc. »
La voix est toujours aussi tranquille et un doigt long et osseux me désigne un petit siège, dans lequel je m’assieds, raide comme un pantin.
Mon hôte est un homme d’environ 40 ans, un peu plus peut-être, il semble plutôt mal en point.
Sa jambe droite est plâtrée, maintenue en l’air par un petit trépied, une minerve lui enserre le cou, son bras gauche est relié à un distributeur de morphine, un drain disparaît sous son drap.
Un pansement recouvre son œil droit, lui donnant l’air d’un pirate sur le retour.
Et son œil gauche est fixé sur moi, comme s’il voulait m’engloutir, un sourire heureux étire ses lèves minces sous une courte barbe châtain.
« - Pardonnez-moi de vous avoir réveillé… », je fais, un peu gêné.
Il sourit avec gentillesse.
« - Je ne dormais pas, vous n’avez rien à vous reprochez. Que faites-vous ici ?
- Moi ? Heu…, commençais-je, paniquant soudain. Ma… Ma fiancée est sur le point d’accoucher ! »
Ma main se crispe encore davantage sur mes trois narcisses. L’homme laisse entendre un léger « Ah ! » de contentement.
« - Un futur papa ! s’exclame-t-il, tout joyeux. Fille ? Garçon ?
« - Je ne sais pas, fis-je. Elle voulait avoir la surprise, pas question de radiographies.
- Oh ! Rares sont les couples capables d’une telle abnégation aujourd’hui ! siffle-t-il. Les gens veulent toujours tout savoir tout de suite de nos jours. Ces fleurs sont pour elles ? »
Je fixe mes narcisses, comme m’attendant à ce qu’elles répondent à ma place.
« - Oui, fis-je, un léger sourire aux lèvres. Ces sont ses fleurs préférées. »
Il me regarde, sourit, comme si ma vue l’emplissait de joie.
« - Comment vous appelez-vous ? » demande-t-il avec douceur.
La question me prend de court.
« - … Simon, murmurais-je.
- Simon… », répète-t-il, les yeux au ciel, comme s’il essayait d’en deviner la signification cachée.
Il se retourne vers moi, ses yeux brillent comme des lanternes.
Une question me brûle les lèvres, j’ose enfin la formuler.
« - Dites-moi, que vous est-il arrivé ? »
Son regard se fait vague, j’ai soudain peur d’avoir été indiscret.
« - Pardonnez-moi ! m’exclamais-je. Je ne voulais pas… ! »
Il me sourit avec tristesse, il a toujours ce petit éclair dans l’œil lorsqu’il me regarde.
« - C’est tout à fait normal, murmure-t-il. Et c’est une longue histoire. Mais si vous êtes prêt à m’écouter… »
Je hoche la tête, sans trop savoir pourquoi, comme si j’avais soudain oublié la raison de ma venue et ce qui m’entourait, que plus rien n’avait d’importance, hormis cet homme et ce qu’il avait à me révéler.
« - Avez-vous écouté la radio ces derniers temps ? »
Un peu surpris, je réponds néanmoins par l’affirmative.
« - Alors vous avez peut-être entendu qu’un journaliste photographe en reportage en Arménie avait été agressé et rapatrié en France en urgence. »
Je fouillais dans ma mémoire. Tout ceci me disait quelque chose.
« - Oui…, marmonnais-je. Je crois bien… Ah oui ! Alors vous êtes Matthieu Vanetzian (1)? »
Un sourire illumina son visage tuméfié, comme si le simple fait de ne pas être un anonyme pour moi le laissait pantelant de joie.
« - Oui, j’ai entendu parler de vous, continuais-je. Vous avez sorti plusieurs livres photographiques, n’est-ce pas ? »
Il hocha la tête, comme éperdu de reconnaissance.
« - En effet, fait-il. Et c’était effectivement pour publier un nouveau recueil que j’ai accompli ce voyage. C’était pour moi un devoir de mémoire. »
Je haussais un sourcil.
« - Voyez-vous, Simon, mon grand-père était arménien, il a échappé par miracle au génocide de 1915 en se réfugiant en France avec sa famille. Il avait alors à peine 17 ans. »
Il soupira, comme si lui-même pouvait se remémorer la douleur éprouvée.
« - Il est mort voilà dix ans, sans jamais avoir eu l’occasion de revenir dans ce pays dont il parlait toujours avec amour et nostalgie. J’ai baigné dans cette culture tout mon enfance. Mon grand-père désirait plus que tout que soit gardée vive la mémoire de ce peuple qui avait manqué de disparaître totalement. Il m’apprit les chants traditionnels, me raconta les légendes, le folklore, m’enseigna les rudiments de la langue, à moi et à mon frère, comme il l’avait fait pour mon père, mes oncles et tantes. C’est pour lui rendre hommage et pour faire de cette mémoire quelque chose de concret et d’accessible que je décidais, voilà un an, de ce voyage en Arménie. Et aussi pour enfin découvrir ce pays que je n’avais jamais vu mais que j’avais l’impression de si bien connaître. »
Je l’écoutais avec religiosité, les mains croisées sur mes genoux.
Il se tût, tentant de rassembler ses souvenirs. Il paressait alors totalement oublieux de ma présence.
« - Ma maison d’édition a tout de suite adhéré à ce projet, reprit-il alors. D’autant que nous commémorons cette année les 90 ans du génocide, ils comptaient publier mon album à la date anniversaire. Date qui prenait d’autant plus d’importance que la Russie venait de reconnaître la réalité des massacres de 1915 (2). Une ONG m’aida à financer le voyage. Ils se chargèrent de me trouver des contacts en Arménie et de la plupart des détails administratifs, je n’avais à me préoccuper de rien, pouvait de tout mon saoul me concentrer sur mon projet. »
Il soupira faiblement, me fixa avec presque de l’hébétude.
« - J’espère que je ne vous ennuie pas, fit-il alors. Vous avez probablement bien d’autres choses en tête… »
J’eus un petit sursaut.
« - Non, au contraire, continuez s’il vous plaît… »
Il parût rassuré.
« - Croyez-moi Simon. Ce pays fut pour moi une véritable découverte. Et il eut sur moi une influence considérable. Tellement que je doute que l’on puisse l’imaginer…
- Que voulez-vous dire ? » demandais-je.
Sa main osseuse se déplaça avec lenteur, vint se poser sur la mienne, qui reposait sur mon genou.
« - Ce que je vais vous raconter maintenant, je ne l’ais révélé à personne, et ne le ferait jamais. Ce sera notre secret et il ne sortira pas de cette chambre. Je suis certain que vous êtes un jeune homme de confiance mais j’ai besoin de votre promesse, néanmoins. »
J’étais ébahi, serrait sans m’en rendre compte entre mes doigts la main noueuse.
« - Mais… Pourquoi me le raconter, à moi ? Nous ne nous connaissons même pas !
- J’ai mes raisons, et vous les révèlerez bientôt, bien que je doute qu’elles vous paraissent suffisantes. Mais elles le sont pour moi. Mais en attendant, promettez-moi. Jurez que tout ceci ne quittera pas cette chambre.
- Promis… », murmurais-je, abasourdi et en même temps étrangement fier.
Il sourit avec satisfaction.
« - La version officielle de mon rapatriement en France est que je me fus la victime de détrousseurs alors que je voyageais de nuit. Et je ne la démentirais pas, car j’ais effectivement été victime d’une agression. Et les raisons en sont on ne peut plus claires… »
Je me penchais un peu en avant, décidé ne pas perdre une miette de son récit.
« - J’atterris à Erevan le 11 mai. Je logeais durant les trois mois de mon séjour chez une famille adorable de 6 membres, un homme, son épouse et leurs quatre enfants, dont l’aîné me servirait de guide pour parcourir le pays. Tout avait été prévu de la meilleure façon possible. »
Il soupira, un léger sourire aux lèvres.
« - Je sympathisais dans l’instant avec cette famille qui avait eu la gentillesse de m’héberger. Ces gens étaient d’une affabilité sans égale, et tellement plus agréables, chaleureux, tellement plus humains en un mot que la plupart des gens que j’avais connu ici. Le père était un grand gaillard très attaché à sa famille et donc d’autant plus stricte et autoritaire avec elle à la moindre incartade de ses membres. Sa femme était, quoiqu’un peu effacée, d’une politesse et d’une gentillesse désarmante. Et ses enfants étaient à son image. Ils étaient donc quatre, deux jumeaux, garçon et fille, de 6 ans, une jeune demoiselle de 13 ans et son grand frère de 20. C’est lui qui me servit de guide durant ce périple délicieux que je dus, hélas, écourter. »
Il leva les yeux vers moi, me constata absorbé par son récit et sembla en concevoir une grande joie.
« - Quand je vous dis Simon, que ce pays fut pour moi celui des révélations et des émotions, les plus intenses que j’eus jamais connu, cette famille y est pour beaucoup. Enormément… »
Il s’arrêta et, pendant un instant, je crûs qu’il allait fondre en larmes.
Mais rien de semblable n’arriva, il reprit son histoire là où il l’avait laissé.
« - Mon guide se nommait Mihran. C’était un garçon adorable, et charmant, qui plus est. Nous eûmes des conversations à n’en plus finir durant notre tour d’horizon de ce pays qu’il adorait et qu’il connaissait comme sa poche. Mon grand-père m’avait appris à aimer l’Arménie, c’était à présent de la passion qui m’animait lorsque je la parcourais, appareil en main, bercé par la voix d’enfant de mon compagnon qui faisait revivre pour moi les légendes médiévales, les héros et les dieux qui avaient peuplés ces paysages fantastiques, ces plateaux enneigés, ces lacs gelés et ces volcans. Oui, c’était bien de la passion… »

Fin de la première partie
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Kestrel21
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MessageSujet: Re: L'Arménien (yaoï)   L'Arménien (yaoï) EmptyMar 21 Mar - 22:45

L'arménien - seconde partie

Sa voix s’éteignit, mon cœur se serra sans que j’en compris la raison.
« - Mihran était enthousiasmé par ce que je lui racontais, sur la France, sur mon métier, sur mes voyages. Il avait très jeune commencé à travailler avec son père dans une usine qui extrayait le cuivre et avait peu eut le temps d’apprendre comme il l’aurait désiré. Il lisait mal, déchiffrait à peine à vrai dire, et n’écrivait que peu. Mais ses talents de conteur étaient admirables et son esprit intéressé. C’est lui qui m’inspira le plus vite de la sympathie à mon arrivée, une affection quasi-immédiate. Et qui ne fit que s’accroître par la suite. »
Il se tût un bref instant. Concentré, je restais muet.
« - Contrairement à ses parents, il n’était guère porté sur la religion, quoiqu’il en respectât les usages. Il me fit visiter de nombreuses églises, parmi les plus anciennes qu’il m’ait été donné de voir (3). Je me souviens du mont Ararat (4), et de mon pèlerinage au lac salé de Van, là où mon grand-père avait vu le jour, dans la petite ville d’Hartavan … »
Il me fixa un bref instant, comme s’il avait soudain perdu le fil de son récit mais je m’aperçus qu’il s’efforçait en réalité de ne pas laisser l’émotion le submerger.
« - Je crois que ces semaines que je passais à parcourir l’Arménie, avec lui, furent parmi les plus belles de mon existence, et je n’ais pas eu à proprement parler une vie vide. Et il me fallu plus d’un mois pour comprendre, et pour m’avouer… »
Il eut un faible sourire.
« - Que moi, photographe immigré quadragénaire, à priori si peu prédisposé à ce genre d’aventure… J’étais tombé fou amoureux de ce jeune garçon, qui aimait tant ce lieu et dont la beauté n’avait désormais plus d’égale pour moi… »
Mes yeux s’arrondirent à peine mais cela me semblait à cette minute tellement dans l’ordre des choses que je n’eus d’autre réaction.
Cela sembla soulager mon hôte.
« - Les deux mois qui me restait à passer en sa compagnie me parurent soudain terriblement dérisoires lorsque j’eus cette révélation. J’aurais voulu continuer, vivre même avec à l’oreille ses histoires pleines d’imagination et aux yeux son visage séraphique. Mas je finis par cesser de me voiler la face, et comprendre qu’il me fallait plus, tellement plus de lui… Et un jour, et sans doute ne saurais-je jamais ce qui me poussa à cela, je lui confessais ce qui m’agitait. Peut-être était-ce une poussée de masochisme ou de désespoir, car pouvais-je réellement espérer qu’une créature aussi jeune et aussi belle se soit trouvée attirée par moi, qui avait deux fois son âge et un physique des plus communs ? Aussi, quelle ne fut pas ma surprise et ma joie lorsque je m’aperçus qu’il répondait à mes sentiments… »
Il poussa un profond soupir.
« - Quelle joie, quelle liesse, Simon ! Imaginez, cet être que j’adulais, que je désirais s’ouvrait et se donnait à moi ! Lorsque je ferme les yeux, je peux encore sentir la douceur de son corps, et son odeur, qui excitait mes sens ! Inutile de vous dire qu’il m’était désormais impossible d’envisager quitter l’Arménie, cette simple perspective m’emplissait d’effroi.
Je tentais malgré tout de me résonner, je faisais des projets : Rentrer en France, déposer mes photos, tout régler et revenir, enfin et vivre ici, rester avec lui… Ce projet me paressait réalisable, il me gonflait d’espoir. »
Je commençais silencieusement à avoir peur de ce qu’il allait me révéler.
« - Et puis… Je ne sais pas trop ce qu’il se passât réellement. Avons-nous été dénoncés, surpris à notre insu ? Je n’en sais rien. Toujours est-il que deux semaines avant mon départ effectif, son père vint me trouver, lui qui ne s’était pourtant guère manifesté jusqu’ici. Il insista pour m’emmener dehors, face à un paysage fantastique dont je ne connaissais rien. Ne voulant pas le fâcher et ignorant tout de ses intentions, je le suivis. Il me conduisit dans un endroit inhabité, il neigeait fort ce soir-là. On nous y attendait, des hommes auxquels j’avais été présenté pour la plupart. Ils étaient armés de masses, je voulus m’enfuir, ils me rattrapèrent sans mal et me battirent, dans le but non dissimulé de me briser l’échine. Je m’évanouis et mon état d’inconscience était probablement tel qu’ils me laissèrent pour mort et m’abandonnèrent là. »
Il eut une horrible grimace.
« - C’est un véritable miracle que je sois encore en vie, murmura-t-il. Et pour la suite, c’est le trou noir. Je me réveillais à l’hôpital principal d’Erevan. Un infirmier m’apprit que j’avais été retrouvé plus mort que vif par une patrouille de chasseurs, tout sanglant et gelé sous une tempête de neige. Ils avaient contacté les autorités, qui m’avaient identifiés grâce à mes papiers, que je portais toujours sur moi. Mon état était d’ailleurs si alarmant que l’on prévoyait déjà mon rapatriement en France. »
Il eut un rictus sardonique. Moi, je me retenais presque de respirer.
« - Je crois que je fondis en larmes quand je fus enfin seul. On ne cessait de me répéter que j’avais eu une chance phénoménale d’être encore en vie, même à demi-impotent et brisé comme je l’étais. Mais je songeais sans cesse que j’aurais mille fois préféré être encore là-bas, et être mort, étouffé dans mon propre sang et enseveli sous la neige, disparu à jamais. J’avais déjà compris que je ne reverrais plus Mihran… »
Il y eut un silence pesant.
« - Je fus ramené en France dans les trois jours qui suivirent, plus décidé que jamais à ne pas révéler que je connaissais l’identité de mes agresseurs, tout comme le motif de mon agression, qui m’aurait obligé de parler de Mihran, d’en parler à des policiers d’une froideur clinique, à des journalistes en manque de ragots. Tant de choses que j’aurais été incapable de supporter… »
Il sembla de nouveau se perdre dans ses pensées, je laissais le silence s’installer, puis demandais :
« - Pourquoi me l’avoir révélé, à moi… ? »
il me fixa longuement puis je vis sa main se lever vers moi.
Comme mû par une force invisible, je me baissais. Sa main caressa légèrement ma joue, les petits cheveux qui jouaient sur mes tempes.
« - Lorsque je vous ais vu, Simon, ouvrir cette porte, pendant un instant, j’ai crû voir Mihran… Et même maintenant, j’en ais parfois l’illusion… Vous lui ressemblez tellement… »
Sa main retomba mollement sur le matelas.
« - Peut-être cela vous paraît-il stupide, mais cela me suffit…
-Savez-vous ce qu’il est devenu après votre départ ? » questionnais-je.
Son œil visible était brillant.
« - Je l’ignore… »
Il y avait de la rage dans sa voix, comme s’il se maudissait lui-même.
« - Malgré le fait d’avoir partagé leur quotidien durant presque trois mois, j’ignore les punitions en usage dans cette famille… Et qu’attendre en matière de tolérance d’un pays ayant subi quarante ans d’occupation soviétique ?! »
Il paressait à présent hors de lui. S’il avait pu se lever, nul doute qu’il aurait agi, et frappé.
Comment et avec quelle force, je ne parvenais pas à me l’imaginer…
Mon regard se posa alors sur mes 3 narcisses, qui gisaient à terre, comme un vêtement froissé.
Mon cœur s’emballa soudain, je me levais brusquement.
Il me regarda, d’abord surpris, puis amusé.
« - Allez-y…, murmura-t-il. Ou votre fiancée risque de ne pas apprécier. »
Comme je restais immobile, à le regarder, il sourit.
« - Merci de m’avoir écouté, Simon. Je vous souhaite bonne chance.»
Je hochais la tête, déglutit avec difficulté.
« - Retournerez-vous en Arménie, un jour ? demandais-je alors.
- Je ferais tout mon possible pour, Simon, soyez-en sûr. »
Je hochais la tête à nouveau.
Et quittais la pièce en courant, sans me retourner.

¤ ¤ ¤ ¤ ¤

« - Tout va bien, tu es sûre ? Tu veux que je t’aide à… !
- Tu es gentil, Simon, mais je ne suis pas en sucre… »
Le nouveau père eut un petit rire, glissa pour la dixième fois son doigt dans le petit paquet de linge qu’Elise tenait serré contre elle, caressa la joue du nouveau-né.
« - Mais… Tu pleures ? »
Simon releva la tête, s’essuya prestement les yeux.
Elise s’approcha, l’embrassa sur le front.
« - Mon gentil sentimental… »
Simon sourit, renifla.
« - Elise, fit-il alors. Attends-moi ici 5 minute, j’ai quelque chose à faire… »
Avec l’accord de sa fiancée, Simon gagna quatre à quatre le second étage, retrouva le couloir, et avec un peu plus de mal cette chambre que, la veille, il avait gagné tout à fait par hasard.
Il l’entrouvrit à peine. Matthieu dormait, visiblement. Aussi Simon s’approcha-t-il le plus silencieusement du monde, se pencha sur lui, murmura au creux même de son oreille :
« - C’est un petit garçon. Il s’appelle Nino… »
L’arménien n’eut pas un tressaillement mais un large sourire éclaira son visage.

Fin.

Voilà… Rien de plus qu’une petite histoire écrite d’un trait, et très banale en somme…
Mais j’espère tout de même que ça vous a plu, n’hésitez pas à me laisser un petit commentaire !

Un jour, j’irais en Arménie ! Si, si !

K21


Précisions :

(1) Nom signifiant en arménien « de la région de Van ».
(2) Le 14 avril 1995.
(3) L’Arménie fut le premier état officiellement chrétien (en 301 après J.C).
(4) 5205 mètres de hauteur. C’est là que, selon la Bible, se serait échoué l’Arche de Noé.

Et si vous avez envie d’en savoir plus sur l’Arménie, je vous conseille un très bon petit bouquin (c’est de là que vienne la plupart de mes infos) : L’Arménie à l’épreuve des siècles, par Annie et Jean-Pierre Mahé. Très bien fait, intéressant et plein de photos superbes !
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mogyuki
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mogyuki


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Localisation : devant une fic ^^
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MessageSujet: Re: L'Arménien (yaoï)   L'Arménien (yaoï) EmptyMer 22 Mar - 1:48

C'est tres joli ^^
un peu triste, surtout qu'on peut supposer que ce pauvre Mirhan a eu un sort encore pire que Mathieu, mais l'histoire est tres belle surtout racontée comme ca, a ce futur pere qui est un total inconnu...
J'aime aussi beaucoup la fin, ou Simon retourne voir Mathieu...
Vraiment, je trouve cette fic tres belle et tres simple!!!

Continue!!!
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Kestrel21
Tit axslnyzien
Kestrel21


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MessageSujet: Re: L'Arménien (yaoï)   L'Arménien (yaoï) EmptyMer 22 Mar - 15:03

Merci beaucoup pour tes deux reviews! Je vais bientôt poster une autre fic d'ailleurs, toujours originale, j'espère qu'elle te plaira!
K21
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kokoroyume
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kokoroyume


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MessageSujet: Re: L'Arménien (yaoï)   L'Arménien (yaoï) EmptyJeu 23 Mar - 19:11

C'était des plus agréable à lire ^^
J'ai vraiment apprécié cette petite plongée dans un évènement qui peut paraître banal mais tellement bien repris et ton style d'écriture est toujours aussi fluide, c'est génial ^_^ !
L'Arménien (yaoï) 129ga
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